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Mystères Joyeux Mystères LumineuxMystères Douloureux

Mystères Glorieux

Mystères du Rosaire

L’humilité

“Dieu est humble”, dit-on parfois. Cette réflexion semble d‘abord déconcertante. Comment Dieu Tout-Puissant, Créateur de l’univers, Créateur des êtres visibles et invisibles, comment Dieu, Maître des mondes spirituels et matériels, comment Dieu peut-Il être humble ?

Réfléchissons bien : l’orgueil suppose toujours une comparaison. On se dit à soi-même, ou aux autres : “Je suis vraiment plus intelligent ou meilleur que ceux-ci ?” Ou bien : “J’ai tout de même un jugement plus juste que ce collègue. Je travaille mieux que lui, je fais davantage d’efforts.” Ou encore, en bien plus ridicule : “Ma famille est noble, ce n’est pas comme celle de mon voisin... Et nous possédons de jolies maisons. Mon grand-père avait une belle propriété à tel endroit... Ces gens-là ne sont que des descendants de domestiques qui servaient chez mes arrière grands-parents... etc, etc...”

L’orgueilleux se compare toujours à quelqu’un qu’il estime inférieur à lui-même. Mais l’orgueil le plus subtil et le plus redoutable est celui qui se compare à Dieu: c’est l’orgueil de Satan : “Non, je suis bien trop grand, bien trop intelligent pour me soumettre, même à Dieu !”

Dieu, Amour car Trinité, Très Sainte Trinité, Dieu ne peut se comparer à personne: seul Il est. Les autres êtres, même les plus parfaits, ne sont que ses créatures, qui n’existent que parce qu’Il l’a voulu. Dieu ne peut être orgueilleux puisqu’Il est le plus grand, le plus puissant, le plus parfait, seul Créateur. Il n’y a personne au-dessus de Lui, car “par Lui tout a été fait.” Si l’on se place ainsi, face à la réalité de Dieu, on peut affirmer : “Dieu est humble.”

Dieu Lui-même se dit humble. Une des très rares fois où le Christ parla de Lui, ce fut pour dire : “Apprenez de Moi que Je suis doux et humble de Cœur.” L’humilité se présente ainsi comme un des attributs de Dieu. Et Dieu désire que l’humilité, attribut essentiel de Dieu Unique, Dieu désire que ses créatures privilégiées en bénéficient.

Lorsque, pour des raisons quelconques on est amené à lire la vie des amis de Dieu, de ceux qui Lui furent le plus proches, comme les saints ou les mystiques, on détecte vite un dénominateur commun qui ne peut manquer d’attirer l’attention : les deux qualités essentielles que Jésus exige de ses saints ou de ceux à qui Il va confier une mission, ce sont l’obéissance absolue aux supérieurs, et l’humilité.

Il n’y a aucune exception à cette règle, comme si elle était la condition sine qua non de la sainteté. En effet, la plus grande des vertus, la véritable charité, sans qui aucune de nos actions n’a de valeur,“Si je n’ai pas la charité, je ne suis rien.” dit Saint Paul, (I Cor XIII, 2) la véritable charité doit toujours s’appuyer sur l’obéissance à Dieu accomplie avec un coeur humble.

Il est impossible, lorsqu’on prie le Rosaire, de méditer en même temps sur ces deux vertus telles qu’elles ont été vécues, à la perfection, par Jésus et Marie.

Pour mieux comprendre l’obéissance de Jésus et de Marie, il faut d’abord s’attarder sur leur humilité. Il faut aussi contempler, avec beaucoup d’amour, comment les deux plus grands représentants de la nature humaine : Jésus et Marie, ce couple parfait chargé de réparer les erreurs du couple Adam et Ève, comment Jésus et Marie ont mis en pratique cette vertu éminente : l’humilité qui surpasse toutes les autres vertus, charité mise à part, évidemment.

Mystères joyeux

Premier mystère joyeux :

L’Annonciation

Certains anges se sont révoltés contre Dieu, par orgueil, et ils ont entraîné l’humanité dans leur chute. Mais Dieu, dès l’origine connaissait la faiblesse de l’homme : chair et esprit, doué d’une sensibilité charnelle que n’ont pas les anges, et d’une intelligence limitée en raison de ses composantes matérielles.

Dieu humble, plein d’Amour et de Miséricorde, ne voulait pas abandonner sa pauvre petite créature humaine aveuglée par le mensonge d’un être de lumière, mais révolté à cause de son orgueil et désormais déchu. Dieu promit à l’homme un Sauveur.

L’Annonciation, c’est la réalisation de la Promesse divine. Dieu humble, s’humilie encore plus aux yeux des hommes, en s’incarnant dans la nature humaine. Pour accueillir l’humilité de Dieu, il fallait une humilité humaine capable de l’accueillir. Ce fut Marie, la toute pure, donc la tout humble, la toute sainte et comblée de grâces. Seule Marie, préparée par Dieu de toute éternité pour former dans son sein la nature humaine du Christ, seule Marie, humble servante du Seigneur, pouvait recevoir la grâce suréminente de devenir la Mère de Dieu, c’est-à-dire la Mère du corps humain de Jésus.

Le mystère de l’Annonciation est grand ! Et pourtant il se réalise dans la plus grande humilité.

Marie, nous contemplons l’humilité de Dieu qui se fait petit enfant, petit enfant dépendant de sa Mère, Lui qui n’était pas soumis aux contingences humaines.

Marie, nous contemplons l’humilité de l’Ange, Serviteur de Dieu, qui sut s’incliner devant toi et saluer une humble fille d’Adam, humble, mais comblée de grâces, car le Seigneur est avec toi. “Je te salue, Marie, comblée de grâces ! Le Seigneur est avec toi.”

Marie, nous contemplons ton humilité. Un compliment d’une telle grandeur te surprend, mais tu es la servante du Seigneur, l’humble servante de Dieu, l’humble servante du Fils de Dieu qui va devenir son Fils.

Nous te contemplons Marie. Tu dis oui à l’Ange. Dieu va venir chez nous. Grâce à toi, Dieu va s’incarner, prendre une nature humaine. Les hommes seront sauvés.

“Dieu chasse les orgueilleux mais Il élève les humbles et fait en eux de grandes choses.” 

Ton humilité nous sauve, Marie. Sois bénie !

 

Deuxième mystère joyeux :

La Visitation

L’honneur que Marie vient de recevoir de Dieu est le plus grand et le plus sublime qui se puisse imaginer sur la terre. Marie est élevée, en dignité, au-dessus de toutes les créatures. Mais Marie demeure la Servante de Dieu et de ses frères. Marie, une si jeune femme, mère quoique vierge, et d’une manière miraculeuse, par l’action du Saint-Esprit, Marie, devient de plus en plus humble à mesure qu’elle contemple, dans son coeur, à travers le petit Être qui grandit en elle, la Majesté infinie de Dieu.

Comme cela devrait être pour chacun de nous, Marie, en contemplant Dieu en elle, grandit en humilité et dans toutes les vertus. Les paroles de l’Ange lui ont fait comprendre que sa vieille cousine avait besoin d’elle pour l’aider dans les travaux de sa maison, en attendant la naissance du petit Jean.

Et Marie part. Méconnue des hommes, et encore inconnue de Joseph qui ignore la grandeur de son épouse, mais pleine de la Charité de Dieu, Marie part, en très humble équipage : un pauvre petit âne, seul moyen de transport des pauvres gens de l’époque.

Marie, nous contemplons encore ton humilité. Toi, la Reine des hommes, la Reine du Ciel, la comblée de grâces, tu te fais la servante de celle qui devrait être ta servante. Marie, nous contemplons ton humilité toute simple, sans histoire, sans détour, ton humilité devenue obéissance et pauvreté.

Marie, tu sais que le Seigneur a fait en toi de grandes choses, et tu t’en réjouis, en chantant et en dansant quand Élisabeth, grâce à son petit enfant, comprit que tu étais la Mère de son Sauveur. Marie, “Tu te réjouis car le Seigneur, dont le nom est saint, a regardé l’humilité de sa servante, et il a fait en toi de grandes choses. Car la Miséricorde du Seigneur s’étend de générations en générations sur ceux qui Le craignent. Et désormais toutes les générations t’appelleront: bienheureuse.”

Toutes les générations te célébreront Marie, cela, tu le sais. Mais aujourd’hui, tu es la servante du Seigneur, et de sa servante Élisabeth. En toute humilité, dans la joie, et dans la charité.

 

Troisième mystère joyeux :

La Nativité de Jésus

Qui pourrait dire, Marie, l’immensité de l’humilité de Dieu, de ton humilité, et de l’humilité de Joseph ? Pour toi, la plus digne de toutes les femmes puisque “tu portes Celui qui porte tout,” pour toi il n’y avait pas de place dans les auberges de Bethléem.

Il y avait trop de monde dans ce lieu, car les juifs arrivaient de partout pour se faire inscrire, obéissant à l’édit de César; obéissant aussi, sans le savoir, à la volonté de Dieu qui voulait qu’il en fût ainsi. Car l’humilité de Dieu, venant sur terre, ne pouvait que choisir l’endroit le plus humble pour naître. Seule l’humilité d’une crèche convenait à sa grandeur. Seule l’humilité d‘une étable était assez noble pour accueillir la plus noble et la plus sainte des familles.

L’humilité de la crèche est pour Jésus, l’Emmanuel, Dieu parmi nous, le plus noble des palais. Et les anges crient de joie, les anges exultent, les anges chantent la Gloire de Dieu : “Hosanna, au plus haut des Cieux...” Les anges réveillent les bergers, les plus humbles gens de la société juive. “Réveillez-vous, bergers, aujourd’hui dans la ville de David, un Sauveur vous est né, un Fils vous est donné. Vous trouverez un nouveau-né emmailloté et couché dans une mangeoire.”

Le Messie promis est né.

Les bergers sont des humbles. Cette révélation ne les étonne pas; ils se lèvent et ils courent à la grotte. Mais les bergers sont aussi des pauvres, et ils se doutent qu’un enfant né dans une grotte, en pleine nuit, aura quelques besoins matériels. Et ses parents aussi. Alors, ils viennent avec des provisions: un peu de lait, une petite couverture faite avec la laine de leurs brebis pour que le bébé n’ait pas froid, un peu d’eau peut-être, et de la nourriture pour Marie et Joseph.

Tout cela est bien pauvre, est bien humble... mais quelle  grandeur, quelle magnificence! Dieu est là: la grotte est son palais. Toute la cour céleste est là et adore le Roi des rois. Les plus humbles sont les plus honorés et les plus heureux. La terre tressaille d’allégresse. Toute la création a été invitée dans la grotte, et aujourd’hui, personne ne manque, car les plus humbles des hommes et les plus humbles des animaux, sont là. Les plus humbles sont les plus proches de Dieu, les plus pauvres, aujourd’hui, sont les plus riches et les plus comblés.

Bientôt d’autres visiteurs viendront rendre hommage au Dieu des dieux présent dans un Enfant. Aux yeux des hommes, certains sembleront être des riches, des maîtres, des savants, et leurs cadeaux seront somptueux. Mais aux yeux de Dieu ce sont des humbles qui ont cru à l’appel que Dieu leur envoyait à travers une étoile.

Bienheureux ceux qui ont un coeur humble, bienheureux car ils sont près de Dieu, bienheureux car ils peuvent accueillir Dieu, Dieu humble, caché dans un Enfant.

 

Quatrième mystère joyeux :

Présentation de Jésus au Temple

Jésus a maintenant quarante jours. Il a été circoncis quand il le fallait, humblement, comme tous les hommes du Peuple juif. Il doit maintenant être présenté au Temple, et racheté, comme tous les enfants mâles premiers-nés, nés sous la Loi de Moïse. C’est la Loi que Dieu a donnée à Moïse pour que son peuple se souvienne comment Dieu le délivra de la terre d’esclavage, et le fit sortir d’Égypte.

Marie vient au Temple pour être purifiée, elle la toute pure. Mais Marie est aussi la toute humble, et elle se soumet en toute simplicité à la Loi de Dieu.

Marie vient au Temple avec Jésus, pour le racheter ! Pour racheter Jésus, Jésus le Créateur, Jésus, Fils de Dieu, Mais Fils de Dieu fait homme! Jésus vient au Temple, chez son Père: l’humilité du Fils s’incline devant l’humilité du Père...

Qui peut comprendre ces choses ?

Jésus, fils de Dieu est présenté au Temple comme n’importe quel autre petit garçon. C’est que Jésus est vraiment homme comme Il est vraiment Dieu. Dieu humble vient vers son peuple, humblement pour ne pas l’effaroucher. Pour ne pas l’intimider. Dieu est caché dans cet enfant, et seuls les coeurs vraiment humbles, humbles de l’humilité de Dieu, peuvent Le reconnaître.

Voici la prophétesse Anne qui vit dans le Temple de Dieu depuis son veuvage. Humblement elle reconnaît en cette jeune femme radieuse la petite fille qui fut probablement son élève, il n’y a pas si longtemps. Mais humblement, elle reconnaît aussi que l’enfant de cette jeune femme ne sera pas un enfant ordinaire...

Voici Syméon, cet humble vieillard qui attendait le Messie. Maintenant il peut partir, il peut retourner à Dieu “dans la paix, car ses yeux ont vu le salut que Dieu préparait à la face de tous les peuples.” Maintenant Syméon est heureux car “ses yeux ont vu la gloire d’Israël et la lumière qui éclairera toutes les nations.”

Voici Marie et Joseph, les deux humbles par excellence. Ils sont stupéfaits et ils ne comprennent pas très bien ce que l’on dit de Jésus. Mais ils gardent toutes ces choses dans leur cœur : le moment venu, au moment voulu par Dieu, tout s’éclairera pour eux. Mais ce sera dans la souffrance, et pour Marie, ce sera au pied de la Croix.

 

Cinquième mystère joyeux :

Recouvrement de Jésus au Temple

Marie et Joseph sont affolés, dans l’angoisse, nous dit l’Évangile : depuis trois jours ils cherchent Jésus. Comment a-t-il pu se perdre, lui toujours si raisonnable, si obéissant et soumis à ses parents ?...

Mais soudain Jésus est là, devant eux, en pleine santé, au milieu des docteurs, parlant d’égal à égal avec eux, eux les plus grands personnages d’Israël, et les plus instruits. Jésus est là! Quel soulagement! Cependant Marie ne peut réprimer une parole qui résume toute la souffrance qu’elle vient d’endurer : “Mon enfant, pourquoi as-tu agi ainsi avec nous ?”

C’est la première fois que Marie prend la parole avant Joseph, car la femme juive devait toujours laisser son mari parler le premier.

“Mon enfant, pourquoi as-tu agi ainsi? Voici que ton père et moi nous te cherchions, tout affligés.”

Jésus connaît l’humilité de sa Mère. Il connaît aussi l’humilité de Joseph, le “juste” selon le Coeur de Dieu. Mais Jésus est venu sauver les hommes, sanctifier les justes et les faire grandir. Jésus doit faire grandir encore l’humilité de la Toute Sainte. Jésus doit purifier l’humilité du Juste. Jésus est l’Amour, et son Amour doit faire grandir jusqu’à l’extrême la sainteté de ses parents de la terre. D’où la douloureuse réponse, qui n’est qu’une question : “Pourquoi me cherchiez-vous ?”

“Pourquoi me cherchiez-vous ? Ne savez-vous pas que Je me dois aux affaires de mon Père ?”

Marie et Joseph ne répondront rien. C’est vrai, Jésus n’est pas à eux ; ils l’ont reçu uniquement pour pouvoir le rendre, un jour. Cela, ils l’avaient peut-être oublié, malgré leur sainteté... Alors Jésus le leur rappelle : eux, Marie et Joseph, qu’Il aime pourtant si tendrement, eux, Marie et Joseph ne sont que les serviteurs que Dieu s’est choisis pour Le préparer à sa Mission. Ils doivent s’en souvenir.

Cependant, Jésus, humblement, maintenant qu’Il a fait ce qu’Il devait faire, qu’Il a ouvert le cœur de quelques personnes à l’Amour du Père, maintenant Jésus redevient l’enfant soumis qu’Il était. Jésus revient avec ses parents à Nazareth... Et Jésus, modèle des humbles et des obéissants, Jésus fut soumis à Marie et à Joseph.

Joseph et Marie ne comprirent pas ce que Jésus leur avait dit. Ils étaient étonnés, mais ils conservaient humblement toutes ces choses dans leur cœur.

Mystères lumineux

Premier mystère lumineux :

Le Baptême de Jésus

Il y a une grande foule sur les bords du Jourdain: toutes sortes de personnes se pressent autour du Baptiste : des jeunes et des moins jeunes ; des gens du peuples, des scribes et des docteurs de la Loi. Il y a des gens de toutes les provinces d’Israël. Et beaucoup d’anonymes. Il y a des pécheurs, beaucoup de pécheurs, car Jean crie de toutes ses forces : “Que venez-vous faire ici, vous tous, gens de peu de foi, vous qui offensez le Seigneur votre Dieu  en accablant les pauvres, en méprisant les veuves et les orphelins ? Que venez-vous faire, ici ? Vos sacrifices de veaux gras ou de taureaux, le Seigneur les méprise. Purifiez d’abord votre cœur, ayez pitié de ceux qui ont faim, vêtissez ceux qui sont nus. Venez ici, près de moi, vous faire baptiser, recevez un baptême de pénitence qui montrera que vous avez vraiment l’intention de changer de vie. Si vous ne voulez pas faire pénitence, inutile de venir ici. Changez d’abord votre cœur, engeance de vipères.”

Il y a un “Oh !” de stupéfaction dans la foule. Quelques anciens, peu nombreux, acquiescent aux paroles de Jean, mais la plupart manifestent ouvertement leur désaccord. Pourtant quelques-uns, même parmi les mieux vêtus, même parmi ceux qui portent de longues phylactères, quelques-uns se détachent de la foule, avancent vers Jean, et entrent dans l’eau... Dans ce groupe, on distingue deux membres du Sanhédrin : Nicodème et Joseph l’Ancien.

— Jean a raison dit Joseph d’Arimatie ; c’est vrai, nous sommes tous des pécheurs

— Oui, ajoute Nicodème, et nous devons nous purifier, car maintenant le Messie devrait bientôt venir.

Peu à peu on s’approche de Jean, d’abord timidement, puis, la file des futurs baptisés s’allonge. Au milieu de ces gens, il est quelqu’un d’un peu plus grand que la moyenne; mais personne n’y prête attention, car l’homme paraît bien quelconque, et vêtu simplement, comme le sont tous les pauvres artisans...

L’homme, un peu plus grand que les autres, est maintenant devant Jean qui, brusquement s’arrête :

— Comment ? Toi ici ? Mais c’est moi qui devrait être baptisé par Toi.

— Fais, Jean, nous devons accomplir toute justice.

En tremblant, Jean baptise Jésus; une voix, comme un coup de tonnerre résonne dans le Ciel :

— Celui-ci est mon Fils Bien-Aimé? Écoutez-Le !

La foule s’est tue, soudain, mais elle n’a pas compris. Jésus sort de l’eau... Jean, alors, se ressaisit et dit à ses disciples qui sont près de lui :

-Voici l’Agneau de Dieu, voici Celui qui ôte les péchés du monde.

Seuls André et Jean vont suivre l’Agneau de Dieu...

Jésus, nous contemplons ton humilité. Toi, l’Innocent, Tu Te mêles aux pécheurs, incognito. Toi, le Fils de Dieu, Tu veux recevoir le baptême de pénitence : est-ce que Tu penses déjà à la Rédemption et au salut de tous les hommes qui sauront se convertir ? Tu es l’Agneau de Dieu, c’est ton nom, aujourd’hui, car Jean le Baptiste vient de découvrir que son cousin, c’est Celui qui, comme tous les agneaux offerts chaque jour, au Temple, en sacrifice, sera la Grande de Victime, l’Agneau de Dieu... Jean le Baptiste a-t-il vu ou deviné ta Croix, Jésus, dans ton humilité ?

 

Deuxième mystère lumineux :

Les noces de Cana

Marie avait été invitée aux noces de Cana. Les familles des mariés étaient des amis très chers, et Marie avait voulu aider les parents surmenés, et participer à la joie des “petits”. Elle avait fait prévenir Jésus qui n’était pas trop éloigné, et Jésus était arrivé avec trois ou quatre de ses nouveaux amis. En ce temps-là, tout le monde pouvait se joindre à la joie des nouveaux mariés et participer au repas des noces : c’était la coutume.

Pour soulager les mamans fatiguées, Marie se levait de temps en temps et allait voir “aux cuisines”, si tout se passait bien, puis elle revenait à sa place et souriait pour rassurer les parents. On était à la fin du repas. Tout le monde avait bien bu, et il fallait maintenant préparer les desserts, de magnifiques gâteaux de noces, délicieux mais encombrants et difficiles à transporter : car il fallait les montrer en entier à toute l’assistance avant de les découper. Discrètement Marie se lève : un coup de main peut être nécessaire.

Les gâteaux sont prêts, on va les apporter: les voici, superbes; les applaudissements éclatent de partout. Marie ne s’assied pas, mais elle se penche vers Jésus, un invité parmi les autres :

— Ils n’ont plus de vin, murmure-t-elle dans les oreilles de Jésus.

Jésus répond quelques mots à Marie, en haussant les épaules, et reste à sa place. Tout le monde, ici, connaît Jésus, le fils de Joseph, le charpentier, mais personne encore ne sait ce qu’il est allé faire, au loin, depuis déjà quelques semaines.

Marie se rassied en soupirant, tout en regardant Jésus qui vient de lui sourire :

— Ne t’inquiète pas, femme, mon Heure...

Pourquoi Jésus se lève-t-Il soudain ? Pourquoi va-t-Il dans les cuisines ? Tiens, les aides vont au puits chercher de l’eau fraîche: c’est vrai qu’il fait chaud, et un peu d’eau fera du bien : on a déjà tellement bu de vin. Mais pourquoi met-on cette eau dans les jarres destinées à contenir le vin ? Les disciples de Jésus, qui observent constamment leur nouveau Maître, ne comprennent pas très bien. Ah! On puise de l’eau ? Et on la fait goûter au maître d’hôtel qui paraît apprécier, tout en s’étonnant un peu. Mais, c’est du vin, cette eau !!!

Jésus reprend sa place, sans rien dire. On sert le bon vin qui accompagnera le dessert. Les invités ne se doutent de rien... Seuls savent les disciples de Jésus et les aides de la cuisine... Jésus ne dit rien, il contemple le bonheur de ses jeunes amis, et l’étonnement de ses disciples...

Le miracle a été fait sans bruit. La noce peut se terminer dans la joie. Humblement, Jésus s’en va avec ses disciples. Mais maintenant les langues peuvent de délier et manifester la gloire de Jésus.

 

Troisième mystère lumineux :

L’enseignement de Jésus

“Apprenez de moi que je suis doux et humble de cœur !”

Jésus vient de renvoyer les foules : ses disciples étaient trop fatigués, ils devaient se reposer un peu...  Jésus a fait beaucoup de miracles, ces jours-ci, Il a beaucoup enseigné. Jésus a été acclamé, applaudi: on venait à Lui pour être guéri, ”car Il les guérissait tous”. On venait à Lui pour écouter sa parole, car “Il parlait comme quelqu’un ayant autorité”. On venait à Lui, car “jamais homme n’avait parlé comme cet homme”.

Jésus vient de renvoyer les foules qui se bousculaient autour de Lui pour recevoir ses grâces. Jésus est maintenant assis avec ses apôtres, enthousiastes, eux aussi, un peu grisés, même, trop grisés peut-être, et ils se demandent lequel, parmi eux, est le plus grand !... Jésus est assis au milieu de ses apôtres : Il grignote quelques olives et un peu de pain tout en contemplant ceux qu’Il a choisis, qu’Il aime, mais qui ne comprennent pas encore ses paroles...

Jésus soupire légèrement puis, s’adressant à ceux qui sont un peu éloignés :

— Venez ici, tous autour de moi.

Les douze apôtres sont maintenant tout près de Jésus, prêts à L’écouter avec attention. Jésus, alors, tout doucement leur dit :

-Celui qui est le plus grand parmi vous, celui qui sera le plus honoré par mon Père, c’est celui qui se fera le serviteur des autres, c’est celui qui se fait petit comme un enfant, c’est celui dont le cœur est pur et humble, plein de douceur et de charité envers ses frères.

Les apôtres se regardent mutuellement, se lançant des regards entendus, pas tous très charitables...

Jésus se tait un moment, puis déclare :

— Apprenez de Moi que Je suis doux et humble de Cœur. Vous savez que je peux guérir les malades, que je console les plus affligés, que je sais enseigner même les plus savants... Mais je ne tiens pas cela de Moi-même, Je reçois tout du Père. Ce que le Père me donne, Je le distribue à tous les nécessiteux. Vous m’appelez “Maître et Seigneur !” et vous avez raison, car Je le suis vraiment. Mais m’avez-vous déjà vu ou entendu m’enorgueillir de ce qui est l’apanage du Père... du Père qui est plus grand que Moi.

Les apôtres se taisent. Jésus reprend :

— Comme je suis doux et humble de cœur, soyez humbles vous aussi; la douce humilité est la plus grande des vertus, et celui qui est humble de cœur, c’est celui là qui est le plus grand de tous.

 

Quatrième mystère lumineux :

La transfiguration

Jésus, Tu emmènes avec Toi, Pierre, Jacques et Jean. Pour qu’ils soient forts pendant ta Passion, et qu’ils se souviennent de cette vision. Mais pourquoi eux seuls ? Les autres aussi auront besoin d’être forts. Jésus, Tu emmènes avec Toi, Pierre, Jacques et Jean. Ils sont fatigués car il fait chaud, et le sentier qui monte au sommet de la colline est bien raide... Mais Tu veux qu’ils découvrent la joie de Te suivre, malgré l’effort que cela demande parfois. Mais pourquoi ces trois seuls ? Les autres aussi auraient pu faire cet effort et connaître ta joie. Pourquoi toujours ces trois ? N’est-ce pas injuste ?

Jésus, Tu emmènes avec Toi, Pierre, Jacques et Jean. Tu as un enseignement important à leur délivrer, car ils devront, plus tard, fortifier leurs frères dans la foi.. Mais pourquoi eux seuls ? Eux aussi devront plus tard, fortifier leurs “ouailles” dans la foi... Jésus, Tu emmènes avec Toi, Pierre, Jacques et Jean. Tu dois avoir une vrai raison pour n’avoir choisi que ces trois.

Jésus, Tu emmènes avec Toi, Pierre, Jacques et Jean. Vous voici au sommet. Pourquoi ces trois seuls ? Jacques sera le premier de tes martyrs: c’est une très grande grâce, mais une grâce redoutable: être le premier de tes martyrs... Pierre, bientôt Te reniera ; Tu le sais. Mais Tu sais aussi que Pierre a besoin, plus encore que les autres, d’apprendre l’humilité : c’est une vertu si rare et si difficile, l’humilité...

Jésus, Tu emmènes avec Toi, Pierre, Jacques et Jean. Soudain paraît une grande lumière qui T’enveloppe tout entier. Et voici Moïse et Élie... Et une “une nuée les recouvrit, et une voix vint de la nuée : celui-ci est mon Fils Bien-Aimé, écoutez-Le.” (Marc, IX, 2-10) Jean se souvient : il a déjà entendu cette voix et ces paroles. C’était au bord du Jourdain, quand le Baptiste invitait la foule à recevoir un baptême de pénitence. La voix désignait Jésus, le Fils Bien-Aimé. Jean se laisse remplir d’amour, lui qui sera plus tard l’apôtre de l’Amour.

Jésus, Tu emmènes avec Toi, Pierre, Jacques et Jean. Voici que de nouveau Tu es seul. Seul avec tes trois apôtres à qui Tu devais apprendre l’humilité. Tu devais enseigner Pierre qui sera le chef : et Pierre devait apprendre de son Maître bientôt crucifié, que le disciple n’est pas plus grand que le Maître, et que, si le maître a été humilié, le disciple le sera aussi. L’humilité, c’est la grandeur des forts, c’est la force des responsables.

Jésus, Tu emmènes avec Toi, Pierre, Jacques et Jean. Tu es seul avec les trois que Tu aimais. Tu devais enseigner Jacques et le préparer, déjà, à ce qui sera son sacrifice suprême : “Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour Celui que l’on aime.” Mais un tel sacrifice suppose que l’espérance habite le cœur de celui qui va mourir.

Jésus, Tu emmènes avec Toi, Pierre, Jacques et Jean. Toi, le Bien-Aimé du Père, Tu dois mettre au cœur de l’apôtre que Tu aimais, tout l’Amour dont il saura devenir l’apôtre infatigable.

Jésus, Tu emmènes avec Toi, Pierre, Jacques et Jean. Voici que ton humilité dévoile maintenant la splendeur de ta divinité.

 

Cinquième mystère lumineux :

L’Eucharistie

Jésus sait que son Heure est imminente. Jésus sait qu’Il est déjà entré dans sa Passion. Jésus sait qu’Il “quitte le monde pour aller vers le Père.” (Jean XVI, 28) Jésus “avait désiré cette Heure, d’un grand désir...” Jésus sait que le Père va bientôt Le glorifier, (Jean XVII, 1 et 2) “et que ses apôtres verront sa gloire”. (Jean XVII, 22) Jésus n’est plus du monde, mais Il prie encore pour que “tous ses disciples soient UN, comme Lui et le Père sont UN.” (Jean XVII, 16 et 20) Jésus n’est plus du monde, mais Il sait la faiblesse des hommes pécheurs et Il ne veut pas les laisser orphelins.

Jésus va entrer dans sa Passion, sa Gloire, pour accomplir le Sacrifice suprême, le Sacrifice de l’Amour qui se donne. Ce sacrifice suprême, Jésus veut le pérenniser, Jésus veut que son Sacrifice soit le Sacrifice perpétuel sans cesse renouvelé, le Sacrifice non sanglant de l’Agneau qui va être immolé dans un instant. L’Agneau de Dieu immolé par Amour doit devenir l’Agneau toujours présent sur les autels des hommes. L’Agneau immolé sur la Croix doit être l’Agneau toujours présent, toujours vivant pour être la nourriture des hommes.

Jésus va vers sa Passion sanglante... mais pour rester éternellement présent parmi les hommes qu’Il aime, voici qu’Il prend le pain : “Prenez, et mangez, ceci EST mon Corps, mon Corps qui va être livré pour vous...”  Maintenant, Jésus prend le vin et rend grâce : “Prenez et buvez-en, tous, ceci est mon sang, – ma vie – qui va être versé pour vous.”

Les mystères de Dieu nous dépassent toujours infiniment. L’humilité du Seigneur nous stupéfie quand Il s’incarne dans un corps d’homme pour venir à notre rencontre et nous sauver. L’humilité de Jésus nous étonne quand Il accepte d’être tenté par le démon, son humilité nous émerveille quand Il se fait tout à tous, serviteur de tous. Mais quand Il nous donne son Corps et son Sang en nourriture à travers le pain et le vin, nous ne savons plus que nous taire...

Alors, tombant à genoux, nous savons seulement adorer le Seigneur, présent réellement dans son Eucharistie, présent avec son Amour, présent avec son Cœur Eucharistique qui nous aime et demande notre amour.

Mystères douloureux

Premier mystère douloureux :

L’Agonie de Jésus

Jésus a tout donné à ses apôtres. Il vient même de se donner à eux, de leur livrer son corps et son sang au cours de la première Eucharistie. Pour rester avec nous, Jésus s’est fait pain et vin. Il a donné sa chair en nourriture, et son sang est pour nous un breuvage. Jésus, pain et vin, est soumis comme le pain et le vin à tous les aléas qui sont le lot des produits de grande consommation. On en fait ce qu’on veut, on peut les renverser, les jeter, ou même les piétiner. Jésus veut nous montrer jusqu’où peut aller son humilité et son Amour pour nous. Jésus nous donne tout...

Après avoir donné l’Eucharistie à ses apôtres, Jésus n’a plus rien. “Jésus avait désiré d’un grand désir manger cette Pâque avec ses disciples.” Jésus a mangé cette Pâque avec ses disciples, Il s’est donné Lui-même en nourriture... et maintenant, dans le Jardin des Oliviers, Jésus est seul.

Jésus n’a plus rien, et Il est seul. Il a laissé huit apôtres à l’entrée du Jardin des Oliviers : ils sont en train de bavarder, de dire n’importe quoi. Jésus a pris avec Lui les trois qui étaient déjà avec Lui, sur le Mont Thabor. Il aurait bien voulu qu’ils prient un peu avec Lui, mais ils dorment...

Jésus est seul car Il a laissé sa Mère dans la maison du Cénacle. Sur le Chemin de la Croix, Marie l’accompagnera, mais dans son Agonie, Jésus doit être seul. Son angoisse totale, sa détresse suprême, Jésus doit les vivre seul. Son humiliation extrême, celle qu’Il vit maintenant et qu’Il vivra dans quelques heures, Jésus doit la vivre seul. L’homme est toujours seul lorsqu’il agonise.

Jésus est seul, et Dieu se tait ! Le Père rejette Celui à qui Il a ordonné de se faire “péché” pour racheter le péché des hommes. Mais Dieu a horreur du péché, et Il ne peut plus regarder Celui que pourtant Il aime d’un Amour éternel et infini. Jésus doit être seul dans son humiliation.

Jésus est seul, rejeté par Dieu, délaissé par toute la terre, abandonné comme un misérable. Jésus est oublié, méprisé. On ne Le connaît plus; on ne veut plus Le voir ; on ne veut plus de Lui. Jésus “n’est plus un homme, mais un ver... le rebut de la société.” Jésus va mourir, comme meurt un malfaiteur condamné à cause de ses forfaits.

Vierge Marie, depuis ta retraite au Cénacle, tu vis ce que vit ton Fils, toi l’humble servante du Seigneur. Toi aussi, Tu obéis et ton humiliation rejoint toutes les humiliations que subit et que subira ton Fils. Car il faut que Tu deviennes l’humble Corédemptrice...

Vierge Marie, laisse-nous contempler l’humilité de Jésus. Laisse-nous consoler le Coeur doux et humble de Jésus. Et apprends à chacun de nous à dire, comme toi, et avec toi, en union avec Jésus humilié :

— “Voici la servante du Seigneur ; qu’il me soit fait selon la volonté de Dieu.”

 

Deuxième mystère douloureux :

La Flagellation

Tout au long du chemin qui va du Jardin des Oliviers jusque chez Anne, Caïphe, puis Pilate et Hérode, Jésus a subi toutes les humiliations possibles. On l’a ficelé pour qu’Il ne risque pas de s’enfuir ou de s’échapper. On Lui a lié les mains. On l’a durement poussé, tiraillé, cogné durant les trajets, préludes du chemin de Croix. On l’a fait tomber, on l’a bousculé, piqué avec des lances, giflé, battu... Et sur son passage, les moqueries, les railleries, les quolibets, pleuvaient. Même quelques-uns de ceux qu’Il avait guéris et comblés de bienfaits ne ménageaient pas les insultes. Le spectacle de l’ingratitude humaine vile et pécheresse s’étalait en toute liberté... Jésus acceptait toutes les humiliations. Jésus, doux et humble de Coeur priait pour ses bourreaux, priait et pardonnait. Car, pour la plupart, ils ne savaient pas ce qu’ils faisaient.

Pour Pilate, Jésus est innocent, c’est sûr. Mais la populace est au bord de l’émeute, et, pour la calmer, il faut la contenter un peu. Il faut bien accéder à ses besoins pervers et avides du sang et de la souffrance d’un homme livré aux autres hommes devenus bourreaux. Pilate ordonne la flagellation. Pilate livre Jésus entre les mains de quelques soldats sadiques. Après, Pilate libérera cet homme encombrant, si le malheureux n’est pas mort avant...

On dépouille Jésus de ses vêtements : honte suprême pour un homme pudique et sensible. On lie Jésus à une des colonnes destinées à attacher les chevaux. Et on frappe, en cadence, aussi fort qu’on peut, sans ménager les réflexions insanes. On s’amuse vraiment bien. Mais on s’énerve surtout, parce que ce condamné, pas comme les autres, ne crie pas. Ce condamné ne se plaint pas: il se contente de regarder ses bourreaux avec des yeux qui parlent, des yeux qui lisent dans le coeur, des yeux pleins de reproches, mais aussi pleins d’amour. Les bourreaux se sentent soudain mal dans leur peau: ils s’arrêtent pour que d’autres prennent la relève. Jésus se tait toujours.

Jésus se tait. Jésus humble, qui sait ce qu’il y a dans l’homme, Jésus prie pour ses bourreaux. Jésus prie pour son peuple “qui n’a pas connu le temps où il a été visité.” Jésus ne fait pas de miracle pour Lui car Jésus sait que, par cette humiliation terrible, il rachète tant d’orgueils, tant de volontés de puissance, tant de jalousies et tant de haines.

Vierge Marie, certains mystiques ont dit que, là où tu te trouvais durant la Passion, tu avais souffert, dans ton corps et dans ton âme, les mêmes souffrances que celles de Jésus. Nous ne savons pas comment cela s’est fait dans la réalité, pour toi. Mais, ce qui est certain c’est que tu connaissais les moeurs de ton époque, et que, sur ton exquise sensibilité, exquise et grande parce qu’immaculée, les humiliations subies par le Rédempteur devaient ricocher  inévitablement. Tu savais que “le serviteur n’est pas plus grand que son Maître” et ton coeur de Mère et de Vierge ne pouvait que vibrer avec la plus grande humilité, à tous les mépris et à tous les outrages subis par ton Fils.

 

Troisième mystère douloureux :

Le couronnement d’épines

Jésus, la flagellation a pris fin. Tes chairs ont été arrachées par lambeaux entiers. Ton sang a coulé à flots ; Tu n’es plus qu’une masse informe et exsangue de chairs pendantes et meurtries. On ne sait pas par quel miracle Tu vis encore. On T’a même obligé à remettre tes vêtements. Tu ne tiens pas debout : alors on Te fait asseoir sur un tronc placé là. Les soldats ne sont pas des tendres, mais l’état dans lequel Tu te trouves les calme un peu. Ils ne savent pas pourquoi, mais ton silence les étonne. Ton silence, et ton regard. Quelques soldats s’en vont, mal à l’aise, chavirés par ta douceur, par ton humilité.

Tous les soldats ne peuvent pas partir, car Tu dois être gardé, et soigneusement surveillé. Ceux qui restent attendent les ordres à venir, et ils s’ennuient. Ils ont bien essayé de jouer aux dés sur le lithostrotos, mais ils n’en ont plus le goût. Soudain l’un d’eux se souvient : “Il a dit qu’il était prophète ! Il a dit qu’il était Roi ! On va lui rendre les honneurs dus à son rang.”

Il faut une couronne : ces branches d’épineux, tressées, feront l’affaire. Il faut un sceptre : pourquoi pas ces roseaux ? Et voici le manteau royal. Sceptre et manteau de dérision, mais couronne atrocement douloureuse...

— “Salut Roi des juifs, salut, fais le prophète...”

Jésus, Tu Te tais toujours. Tu as accepté les coups sans Te plaindre. Tous les coups... Tu as accepté les quolibets sur le chemin de ton arrestation. Tu Te tais toujours. Jésus, maintenant on rit de ta Royauté : c’est vrai, ton Royaume n’est pas de ce monde !

Jésus, Tu accueilles toutes ces humiliations car Tu sais qu’un jour, des hommes courageux, tes disciples de tous les temps, seront martyrisés non seulement dans leur corps, mais aussi dans leur coeur, dans leur âme, dans leur sensibilité et dans leur honneur. Tu sais qu’ils devront subir d’innombrables moqueries, de terribles humiliations. Cela Tu le sais Jésus, et Tu sais que les persécutions du coeur sont souvent les plus terribles.

Jésus, doux et humble, Tu prends aussi sur Toi ces humiliations destructrices. Tu veux que tes fidèles aient des cœurs doux et humbles capables de supporter humblement les humiliations qui ruinent les âmes car elles les atteignent au plus profond de leur être. Jésus, ton humilité voulait leur donner l’exemple pour que, malgré les épreuves, ils puissent, jusqu’au bout, conserver la foi, pour qu’ils puissent continuer à marcher sur tes chemins. Dans l’humilité. En suivant ton exemple.

Vierge Marie, il y a dans la Passion de Jésus des épisodes qui nous déconcertent, des épisodes mal compris, ceux du martyre du Cœur de Jésus. Et ce martyre du Coeur de Jésus, c’était aussi le tien.

Vierge Marie, dans notre monde occidental, dit libre et civilisé, il y a tant de martyrs du coeur. Il y a tant de pauvres qui, dans tous les milieux, préfèrent être moqués, méconnus, incompris plutôt que de renier Jésus, plutôt que de trahir leur foi.

Vierge Marie, nous te prions pour tous ceux qui sont rejetés à cause de Jésus.

 

Quatrième mystère douloureux :

Jésus est condamné à mort

Jésus est innocent, mais Il doit mourir car on ne veut plus de Lui. On ne veut pas de sa doctrine, de son humilité. On ne veut pas de ceux qui prêchent l’amour...

Jésus est innocent. Pilate en est sûr. Pilate a fait flageller Jésus : il pensait qu’après un tel supplice, les juifs s’apaiseraient et rentreraient chez eux ; d’autant plus que ce soir, c’est pour eux la Pâque solennelle. Mais non ! Ils veulent la mort du Juste, ils veulent la mort de l’Innocent. Ils menacent même Pilate de le dénoncer à l’Empereur, son Empereur, et de l’accuser de protéger un rebelle. Pilate sait qu’il n’en est rien. Jésus n’est pas rebelle : Il a même dit : “Rendez à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu !”

Jésus est innocent, Pilate le sait, mais Pilate a peur. Pilate a peur des juifs ; mais il a encore plus peur de cet homme qui se prétend Roi, qui se dit Fils de Dieu, et qui, néanmoins, accepte toutes les humiliations sans ouvrir la bouche... Pilate a peur, car il ne comprend pas les humbles, et Jésus est humble, d’une humilité qui semble surhumaine.

Jésus est innocent, mais Pilate a peur. Pilate a peur et il a grande hâte de se débarrasser de cet homme encombrant. Pilate a peur, et sa peur devient panique... Il doit se décider, et vite.

Pilate demande de l’eau, et il se lave les mains : il n’est pas coupable du sang de cet innocent qu’il va condamner. Il a peur de ce juste venu rendre témoignage à la vérité. Mais qu’est-ce que la vérité ? Pour Pilate, la vérité, pour l’instant, c’est de se débarrasser d’une affaire trop gênante. Pilate condamne Jésus à mort. Motif de cette condamnation : ”Jésus, Roi des juifs !”

C’est dur de mourir à trente ans, même après une cruelle flagellation. C’est dur de mourir humilié, chargé de crimes et de péchés quand on est innocent. C’est dur de mourir quand on est la Vie et qu’on est venu sur terre pour que les hommes aient la vie et qu’ils l’aient en abondance. C’est dur de mourir incompris, méconnu, délaissé par tous les siens.

Jésus se laisse charger de sa Croix. L’humilité de Jésus rejoint l’humilité de Dieu qui est au-dessus de tout. Car Dieu est incomparable, Il ne peut être comparé à personne, puisque Lui seul, Il est. L’humilité de Jésus va devenir sa gloire.

 

Cinquième mystère douloureux :

Jésus meurt sur la Croix

Jésus a été crucifié dans des souffrances atroces. Jésus n’a pas crié, Jésus a continué de se taire, Jésus a continué à prier pour ses bourreaux... Jésus ne cesse de prier pendant que les chefs de son peuple continuent à l’insulter : “S’Il est le Fils de Dieu qu’Il descende de sa Croix !”

Jésus ne descendra pas de sa Croix. Il y a trois ans, juste avant de commencer sa vie publique, dans le désert, alors qu’Il luttait contre Satan et ses tentations, Jésus a choisi la volonté de Dieu, définitivement. À Satan qui Lui proposait des actions spectaculaires et extraordinaires, comme par exemple celle de se jeter du haut du Temple : “Si tu es le Fils de Dieu, jette toi en bas !...” Jésus répondit:“Tu ne tenteras pas le Seigneur ton Dieu...” Et Jésus choisit de n’utiliser que des moyens humbles pour convertir les foules et pour sauver le monde.

Jésus humble, ne peut employer que des moyens humbles. Sur la Croix, Jésus reste humble, mais, à la différence des condamnés ordinaires, Il promet le Paradis au larron repenti. Jésus donne sa Mère à Jean qui, au pied de la Croix, représente toute l’Église : Jésus sait qu’Il va ressusciter, mais Il sait aussi qu’Il doit d’abord montrer aux hommes toute l’horreur du péché et à quelles souffrances il peut conduire.

Sur la Croix, Jésus parle de nouveau pour exprimer son impuissance face au délaissement du Père. Jésus remet son âme au Père après s’être doucement plaint d’avoir été abandonné. Mais Il devait connaître, humblement, la douleur infinie du silence de Dieu, l’abandon de Dieu.

Puis Jésus crie sa soif des âmes, des âmes qui refuseront son amour et son salut. Jésus crie sa soif des âmes qui Le rejetteront éternellement. Jésus crie sa soif des âmes qui ne voudront pas de son humilité, qui n’accepteront pas l’humilité de Dieu.

Jésus meurt... L’âme de Jésus s’en va vers le Père. Il ne reste plus sur la Croix qu’un cadavre exsangue, affreusement déchiré, broyé, écartelé, défiguré. Il ne reste plus sur la Croix qu’un homme qui expire et qui, dans un grand cri que son corps mourant ne peut plus retenir, hurle l’affreuse souffrance de l’homme seul qui meurt de son effroyable martyre.

Jésus est mort. Il ne reste plus sur la Croix que le cadavre d’un homme au coeur ouvert, transpercé par la lance d’un soldat romain qui soudain reconnaît, le Dieu de l’univers... Dans l’homme humble, humilié, méprisé, condamné, outragé, martyrisé, le païen découvre la Gloire du Fils de Dieu.

Mystères glorieux

Premier mystère glorieux :

La Résurrection de Jésus

Jésus avait dit à ses apôtres “qu’Il devait être arrêté, beaucoup souffrir et être mis à mort. Mais, avait-Il ajouté, le troisième jour, Il ressusciterait.”

Nous sommes le troisième jour après la mort de Jésus. La veille, le premier Samedi Saint, le jour du Sabbat, la plupart des apôtres s’étaient retrouvés et rassemblés autour de Marie. Ils n’étaient pas très fiers d’eux... Leur découragement était extrême : qu’allaient-ils devenir, eux qui avaient tout quitté pour suivre Jésus, maintenant que Jésus était mort ? Leur remords aussi était extrême car ils avaient fui au moment où leur Maître avait eu besoin d’eux. À la Résurrection, ils ne croyaient guère. Les femmes avaient préparé les aromates pour embaumer le corps de Jésus : cela les avait occupées, mais eux les hommes, n’avaient eu rien d’autre à faire que de discutailler et de pleurer sur leur sort.

Dimanche matin, à l’aube. Presque tout le monde dort dans la maison du Cénacle. Quelques femmes reprennent les aromates et les baumes pour les assouplir. Tout doucement, elles sortent et se dirigent vers le tombeau.

Soudain on ressent une légère secousse sismique, mais la ville de Jérusalem reste silencieuse. Dans le jardin où se trouve le tombeau, les gardes semblent anormalement agités. Les femmes avancent prudemment: comment vont-elles être accueillies par ces gardes, et qui leur roulera la pierre ? Mais voici que les gardes s’en vont en discutant très fort. Les femmes sont soulagées et avancent jusqu’au tombeau. Que s’est-il passé ?... La pierre ne ferme plus l’entrée ? Le tombeau est vide!... Un homme avance : “Vous cherchez Jésus le Crucifié ? Il n’est pas ici car Il est ressuscité comme Il l’avait dit...”

Les femmes effrayées s’enfuient pour porter la nouvelle aux disciples ; mais Jésus vient à leur rencontre en disant : “Je vous salue ! Ne craignez pas, allez dire à mes frères que Je les attends en Galilée.”

Jésus est ressuscité. Tout est joie dans la nature en ce matin de printemps. Jésus est ressuscité, et Jésus va se montrer aux hommes, pour qu’enfin ils croient. Mais Jésus, ressuscité, glorifié, est toujours humble, de l’humilité de Dieu. Sa Résurrection s’est faite presque sans bruit, et les premières personnes à qui Il se montre, ce sont des femmes !

Que Jésus Ressuscité se montre d’abord à des femmes, cela ne nous paraît pas extraordinaire, à nous gens du XXIe siècle. Mais pour bien comprendre l’attitude de Jésus, il faut considérer la mentalité du peuple juif à l’époque du Christ. Les femmes n’avaient aucun droit civique, elles demeuraient d’éternelles mineures. On n’avait, à cette époque, aucune considération pour les femmes qui n’étaient que des êtres inférieurs.

Les femmes n’étaient que des êtres inférieurs, et c’est à des femmes que Jésus apparaît d’abord. C’est à des femmes que Jésus confie le soin d’aller prévenir ses frères. Ce sont des femmes qui, les premières, ont vu Jésus ressuscité, et qui ont cru. Miracle de l’humilité de Jésus, qui, sans éclat, sans discours, libère la femme du mépris où elle avait toujours été tenue. Jésus humble, est le vrai libérateur de la femme !

 

Deuxième mystère glorieux :

L’Ascension du Seigneur

Jésus est ressuscité. Il s’est montré à ses disciples à plusieurs reprises. Il s’est “même montré à plus de cinq cents frères à la fois.” Les apôtres ont touché Jésus. Ils ont mangé et bu avec Lui, ils ont mis leurs mains dans les trous de ses plaies. Les apôtres sont heureux. Toutefois Jésus ne se comporte pas tout à fait comme avant. Il arrive au moment où on ne L’attend pas. Soudain Il est au milieu d’eux, comme çà d’un seul coup. Jésus est devenu le Seigneur et les apôtres sont souvent intimidés. Leur humilité se forme. Ils prennent conscience de leurs misères, de leur petitesse. Ils comprennent que Jésus est vraiment le Fils de Dieu. Jésus n’est plus comme l’un d’entre eux... Mais Jésus est là, et c’est l’essentiel.

Jésus rencontre souvent ses disciples et poursuit leur formation, car ils n’ont pas encore compris. Ils ne comprennent pas non plus que Jésus tienne de nouveau des propos qui les déconcertent. Ainsi, Il leur a dit, récemment : “Il Vous est bon que Je m’en aille. Si Je ne m’en allais pas, Je ne pourrais pas vous envoyer l’Esprit... Ne craignez pas, Je ne vous laisserai pas orphelins. Restez ici ensemble, en attendant le Consolateur que Je vous enverrai.”

Il y a quarante jours que Jésus est revenu sur la terre, et aujourd’hui Il est avec eux. Jésus se fait de plus en plus tendre, de plus en plus proche. Jésus est si doux, si aimant, si humble, que les apôtres se risquent même à Lui poser la question qui leur brûle les lèvres depuis quelques jours : “Est-ce maintenant que Tu vas rétablir la Royauté en Israël ?” Avec un soupir, Jésus leur répond : “Ce n’est pas à vous de connaître les temps ni les moments que le Père a fixés de sa propre autorité, mais vous recevrez la force du Saint-Esprit qui descendra sur vous, et vous serez mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu’aux extrémités de la terre. À ces mots Il fut élevé, et une nuée Le déroba à leur vue.” (Actes I, 6-9)

Jésus Ressuscité est toujours Jésus au Coeur humble et doux. Et tellement patient !... Jusqu’à la dernière seconde, Il aura dû supporter l’esprit borné et lent à croire de ses disciples. Jusqu’à la dernière seconde de son passage sur la terre, Jésus aura dû supporter les préjugés de ses apôtres et leur incapacité à comprendre les choses de Dieu. Seul l’Esprit qu’Il leur enverra, après quelques jours de prière silencieuse, seul l’Esprit-Saint pourra leur ouvrir l’intelligence...

Jésus, que de patience Vous avez eue avec les douze! Que de patience Vous devez encore avoir avec nous! Nous contemplons la profondeur infinie de votre humilité. Vous la Sagesse, Vous devez supporter nos folies, nos intelligences limitées, défaillantes, et fermées aux choses de Dieu. Vous, l’Intelligence infinie, l’intelligence hors du temps, Vous devez prendre tant de temps pour éclairer nos pauvres intelligences bornées et pourtant orgueilleuses. Vous, Jésus, l’humilité absolue, Vous prenez sans cesse la peine, et le temps de réformer nos coeurs blessés par le péché et surtout par l’orgueil...

Jésus, Vous êtes monté au Ciel. Mais vous êtes toujours avec nous, et humblement, votre Esprit-Saint nous enseigne la vérité, votre vérité qui rend libre.

 

Troisième mystère glorieux :

La Pentecôte

Jésus est monté au Ciel ; les apôtres l’ont vu s’élever... Ils ont, aussi, vu et entendu les deux hommes, certainement des anges, qui leur demandaient de retourner à Jérusalem. Les apôtres, orphelins, ne se sont pas fait prier : ils se sont vite enfermés dans la salle du Cénacle, “par peur des juifs !”.

Il y a déjà neuf jours de cela, et aujourd’hui, c’est le dixième jour. Marie est là et les apôtres prient avec elle. Les apôtres ont perdu une bonne part de leur orgueil et de leurs prétentions, mais ils s’interrogent encore. Pourtant, Pierre, humblement, prend quelques initiatives, comme l’élection de Matthias qui devra occuper la place laissée libre par Judas.

Ce matin, dans le Cénacle, tout est calme. Marie est entourée des “douze” et prie avec eux la prière que Jésus a enseignée : “Notre Père, qui es aux Cieux...”

Soudain l’Esprit est là, l’Esprit repose d’abord sur son Épouse Immaculée, puis se partage entre les disciples et leur emplit le coeur, et leur ouvre l’intelligence.

Tout s’éclaire maintenant, et les disciples n’ont plus peur. Ils sortent, ils parlent, ils expliquent, humblement, patiemment, car ils savent bien que leur science ne vient pas d’eux, qu’ils ne l’ont pas méritée, mais que c’est Jésus qui leur partage son Esprit. Et tous les hommes qui sont là les comprennent, chacun dans sa propre langue, la langue de son pays, car les apôtres laissent l’Esprit parler en eux.

L’Esprit de Jésus emplit le coeur et l’âme de ses apôtres. Ils peuvent “aller et enseigner les nations...” Les douze vont pouvoir se séparer et aller enseigner tous les peuples, même les païens qu’ils méprisaient tant. Bientôt ils créeront des communautés chrétiennes dont le signe distinctif sera l’amour : “Voyez comme ils s’aiment” dira-t-on autour d’eux.

Les apôtres créent des communautés nouvelles dont les signes distinctifs sont l’amour et l’humilité, car l’Esprit de Dieu n’écrase pas, l’Esprit de Dieu aime les pauvres et les petits, l’Esprit de Dieu ne rejette pas les pécheurs qui se repentent et reviennent au Père, l’Esprit de Dieu est humble car Il est l’Amour, car Il est Dieu, et Dieu est humble.

 

Quatrième mystère glorieux :

L’Assomption de Marie

Marie est seule pour l’instant dans sa petite maison car Jean est allé chez des disciples... Marie semble fatiguée mais elle s’active à ranger sa maison et ses affaires. Marie prie aussi: son regard intérieur se tourne sans cesse vers son Fils, et vers Dieu, le Père et l’Esprit-Saint. Marie soupire : elle s’ennuie un peu... car son Fils est loin tout en étant tout près. Marie, notre Mère est soumise aux mêmes contingences que nous, et parfois Dieu se fait plus lointain, et Marie se meurt d’amour.

Marie s’arrête, comme appelée par une voix intérieure. Marie soudain pâlit : elle ne se sent pas très bien, elle toujours si vaillante...

Que se passe-t-il? Marie aurait-elle compris que son Heure à elle, l’Heure du retour vers Dieu est arrivée ? Marie s’allonge, Marie ferme les yeux, Marie sourit, son visage si pâle s’illumine, Marie semble s’endormir en contemplant des merveilles qu’il n’est pas donné à l’homme de voir sur cette terre.

Comme tous les êtres humains, Marie doit quitter notre terre et sa vie laborieuse. Marie humble va s’en aller au Ciel et retrouver son Fils et son Dieu. Marie va contempler la Trinité... humblement, sans bruit, sans autre manifestation extérieure que son sourire d’extase.

Marie, la servante du Seigneur retourne vers son Seigneur. Comment cela se fera-t-il ? Peu importe! Nous savons seulement que Marie va monter au Ciel, comme son Fils, avec son corps et son âme, avec son être tout entier devenu glorieux.

Marie monte au Ciel, avec son corps, avec son âme... Marie va retrouver Dieu qui fut son unique Amour, Dieu qu’elle a toujours servi de tout son coeur, humblement, très humblement, comme n’importe quelle autre femme vertueuse. Les merveilleux secrets de son coeur uni à Dieu étaient cachés aux yeux de tous les hommes.

Marie monte au Ciel, vers le Ciel qui va s’entrouvrir. Les yeux de Marie s’ouvrent et Jésus est là, devant elle. Jésus, Dieu, Jésus, Parole du Père, Jésus deuxième Personne de la Sainte Trinité, Jésus est là, devant la Femme qui lui a donné son corps d’homme. Jésus est là, Il accueille sa Mère !

Aucun homme n’a pu assister à cette scène céleste. Pourtant, essayons d’imaginer. Jésus tend les bras vers sa Mère et bientôt Il l’étreint. Le Dieu Puissant, le Créateur du Ciel et de la terre, Dieu, le Maître de tout l’univers, Dieu vient à la rencontre de sa Créature... Il faut contempler l’humilité de Jésus qui se penche vers Marie, une créature comme nous. Il faut s’arrêter et adorer Jésus, doux et humble de Coeur... Il accueille sa Mère, sa Maman qui accepta d’être la Corédemptrice. Il faut contempler Jésus si grand et pourtant si humble qui reçoit dans ses bras et étreint Marie, la plus belle de ses créatures.

Il faut s’émerveiller de l’humilité de Dieu qui comble de son Amour une Femme, certes la plus sainte des femmes, celle que toutes les générations appelleront Bienheureuse, mais cependant une simple Femme.

 

Cinquième mystère glorieux :

Le Couronnement de Marie

Méditer sur l’Assomption de Marie n’est pas chose facile, même si cette méditation nous conduit à contempler l’humilité de Dieu et de la plus sainte de ses créatures. Mais méditer sur le Couronnement de Marie est encore bien plus difficile !

Nous ne savons absolument rien de ce qui se passe dans le Ciel. Certains mystiques ont reçu quelques révélations ; des artistes ont imaginé et représenté des scènes merveilleuses... mais le commun des mortels ignore tout. Le commun des mortels, dont nous sommes, ne peut que contempler l’humilité de Dieu qui couronne une créature, et la fait Reine du Ciel et de la terre.

Marie, notre Maman du Ciel, cette Maman que Jésus nous a donnée en mourant sur la Croix, Marie est aussi notre Reine. L’Apocalypse avait vu la Femme dont le front était ceint d’une couronne de douze étoiles. Mais cette femme souffrait dans les douleurs de l’enfantement...

Aujourd’hui la Femme est couronnée. La plus parfaite des femmes, la plus parfaite des créatures est couronnée Reine des Anges, Reine du Ciel, Reine de l’univers. Marie, la douce Marie, Marie l’humble épouse de Joseph, Marie la Maman de Jésus et la Femme qui souffrit dans son coeur et dans son âme la Passion de Jésus, Marie est devenue notre Reine !

En couronnant Marie, Dieu couronne les vertus de la Femme, mais surtout, Il couronne son humilité, l’humilité de sa servante, l’humilité de sa servante vers laquelle, Il s’était penché le jour de son Incarnation.

Et nous, que devons-nous faire? Nous taire, et contempler en silence, l’humilité de la Sainte Vierge, la Mère de Dieu.